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Google sous le joug de la Commission européenne : le patron d’Android nous répond

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Lors d’un de ses passages à Paris, nous avons eu l’occasion de rencontrer Hiroshi Lockheimer, vice-président senior d’Android reconnu comme le grand patron de l’OS mobile. L’occasion de revenir avec lui sur la décision de la Commission européenne.

Google l’a officiellement annoncé : Android devient payant. La décision ne vient toutefois pas de l’entreprise elle-même, mais de la décision de la Commission européenne qui a estimé que le développeur était en abus de position dominante dans le domaine des OS mobiles.

Cette décision force un changement drastique de philosophie pour Google sur son OS mobile dont les répercussions pourraient être énormes. Pour éclaircir tout cela, nous avons été à la rencontre de Hiroshi Lockheimer, vice-président senior plateformes et écosystème Google considéré comme le grand ponte d’Android en interne chez Google.

Cette interview a été réalisée par Geoffroy Husson de FrAndroid et Julien Cadot de Numerama.

Android est passé payant, mais ça n’est pas fini

Le 16 octobre 2018, Google a annoncé que ses services deviendraient payants sur Android suite à la condamnation de la Commission européenne. Pourtant, Google a bien fait appel et ne compte pas se laisser faire.

Hiroshi Lockheimer nous a reprécisé la situation. La date butoir pour respecter la décision de la Commission était au 29 octobre, forçant le développeur à faire son annonce le 16 octobre. Un appel d’une décision de la sorte pouvant prendre entre 2 et 3 ans avant de se résoudre, l’entreprise est obligée de s’y plier en attendant que les procédures soient totalement finies. Il est donc toujours possible qu’Android revienne à son modèle économique initial s’il gagne en appel.

C’est d’ailleurs toujours l’espoir entretenu en interne. Le grand patron d’Android souligne en effet que la décision lui paraît, respectueusement, incompréhensible. Il met en avant le fait qu’elle ne prend pas en compte iOS comme un concurrent, quand bien même tous les observateurs s’accordent à le dire. Apple lui-même n’hésite jamais à le railler au cours de ses conférences. Cependant, Android est un logiciel sous licence, quand iOS est exclusif aux produits développés par Apple.

Le concurrent d’Android est Android

Hiroshi Lockheimer avance qu’Android a créé plus de compétition et de diversité, puisque le système d’exploitation en lui-même est gratuit et libre de droits. Il est utilisé comme base pour d’autres OS (Kai OS, Fire OS) ou comme moteur de nombreux produits (voitures, TV) sans que Google n’ait le moindre accès.

C’est d’ailleurs pour cette raison que l’homme d’affaires est bien en peine de nous citer un concurrent d’Android autre qu’iOS. Dans cette perspective, il met plutôt en avant que des concurrents peuvent naître chaque jour en ayant pour base un Android dénué du moindre service Google. Or sans ses services, Google ne fait aucun bénéfice et n’a aucun contrôle.

Plus de bénéfices pour Google ?

Pourtant, Android est maintenant payant… N’est-ce pas là une nouvelle manne qui s’ouvre pour Google, qui pourrait ainsi se rémunérer autant sur ses services (sur la durée) que sur les accords passés avec les OEM (par appareil) ? Hiroshi Lockheimer tient d’abord à rappeler le modèle économique de Google, et du même temps d’Android. Selon lui, Google ne vend pas les données de ses utilisateurs : ils utilisent les données glanées auprès de ses utilisateurs pour vendre des publicités mieux ciblées sur ses plateformes (dont Android) à ses partenaires commerciaux.

Ces derniers n’ont donc pas accès aux données des utilisateurs ; Google est la seule entité dans ce schéma à y avoir accès, et il ne les revend pas. Il les utilise. Si le ton se veut rassurant, c’est à vous de déterminer si cela vous convient vraiment. En tout cas, le géant de la Tech insiste : ces données ne sont jamais revendues.

Notons par ailleurs que le tarif demandé aux constructeurs pour utiliser Android sur un appareil varie selon sa gamme. Nous avons pu avoir un bref aperçu des tarifs proposés, mais Hiroshi Lockheimer n’a pas voulu nous expliciter cette grille qui « reste confidentielle ». Il nous a tout de même précisé que l’idée est d’avoir une tarification juste et équitable où un produit vendu à 100 euros n’est pas aussi taxé qu’un produit vendu à 1000 euros. La problématique est d’arriver à la définir désormais.

Alors, double rémunération dans ce contexte ? Pas vraiment. La logique de Hiroshi Lockheimer est la suivante : pour pouvoir « offrir » de la publicité aux consommateurs, encore faut-il en être proche. Auparavant sur le mobile, lorsque la notion d’OS n’était pas vraiment développée, les opérateurs et les constructeurs étaient les plus proches des consommateurs dans un univers totalement fermé. Rappelons-nous de ce fameux temps où notre opérateur nous installait des applications publicitaires obligatoires sur nos téléphones loin d’être « smart ».

Avec la décision de la Commission européenne, Google risque d’être éloigné du consommateur puisque le constructeur peut tout à fait choisir de ne pas utiliser ses services. Pas de moteur de recherche Google par défaut — et donc une liberté totale de shunter le modèle économique faisant qu’Android était gratuit jusque-là — pour se tourner plutôt vers des rivaux comme DuckDuckGo ou le français Qwant. L’entreprise n’a tout simplement plus de garantie de recevoir ses revenus publicitaires en distribuant son OS. Malgré tout, Bruxelles n’a pas forcé Google à séparer le Play Store d’Android, alors même que le magasin d’applications est un des aspects les plus importants pour les revenus générés par la plateforme.

Le Play Store en APK

Par ailleurs, le Play Store ne sera pas officiellement proposé en tant qu’application à télécharger séparément en APK suite à cette décision. Le patron d’Android est définitif là-dessus : son magasin reste un aspect de l’OS requérant qu’un contrat soit signé entre le constructeur et Google, et qu’une relation soit créée entre les deux entités. C’est important pour le développeur de connaître la plateforme de distribution et pouvoir garantir aussi bien sa compatibilité que sa sécurité.

Que retenir de tout ça ?

Hiroshi Lockheimer nous a tout simplement présenté sa vision de la place d’Android sur le marché, et l’impact de la décision de la Commission européenne sous l’angle de Google. On tire de cette entrevue une chose : cette décision, ou plutôt la manière dont elle a été prise, semble étonner en interne.

À plusieurs occasions, Hiroshi Lockheimer pointe (respectueusement) du doigt le fait que l’analyse de la Commission européenne lui paraît un peu abusive ou manquante d’information. C’est d’ailleurs pour cela que Google a fait appel : clarifier plus en détail sa place dans le marché.

Il faut dire que comme le note le vice-président senior, le modèle économique qu’entretenait jusque là Android était totalement novateur, une première dans l’industrie. De ce fait, il est tout à fait possible qu’une incompréhension ait pu avoir lieu… tout comme un abus, comme le défend la Commission européenne. Aussi, cette affaire risque bien de créer un précédent important dans le milieu de la Tech, qui viendra réguler pour les années à venir l’utilisation d’un même modèle.


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